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  • Anne Ballner

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Élodie arrive en courant au pied de l’immeuble. Elle ne rentre pas. Elle se précipite au milieu des containers à ordures, récupère un sac à dos et dépose un sac poubelle bien ficelé.

- « Alors Élodie l’Étourdie, encore une de vos absurderies habituelles ? Vous êtes revenue à temps, juste avant les éboueurs. »

- « Ah oui Monsieur Dubois, c’est fatigant vous savez d’être aussi tête-en-l’air. Je fais des efforts, mais c’est plus fort que moi, mes pensées prennent le dessus et je ne sais plus ce que je fais de mes bras et mes jambes. »

- « Et qu’elles étaient vos pensées matinales, tellement envahissantes que vous avez mis votre cartable à la poubelle ? »

- « Je ne sais plus. Et puis, les pensées de toute façon c’est personnel. Je ne vous aurais pas répondu. »

- « Traitez-moi de curieux pendant que vous y êtes ! Je n’essaie que de vous aider. Allez, bonne journée Élodie l’Étourdie . »


Elle repart déjà en courant vers l’arrêt du bus que l’on aperçoit au bout de la rue.


Dubois rentre dans l’immeuble. Il habite au premier étage et ne prend jamais l’ascenseur. C’est bien ce qu’ils fait pester quand il détaille les charges de l’immeuble et voit qu’on lui attribue une part des frais liés à l’ascenseur. À la dernière réunion de copropriété, Monsieur Périer lui a justement conseillé de désormais prendre l’ascenseur puisqu’il en paie une part. Hors de question. Il continue à monter son étage au moins six fois par jour, au gré de ses courses, promenades et toutes les bonnes raisons qui le font descendre sur le trottoir humer l’humeur de l’immeuble et du quartier. C’est comme cela qu’il occupe sa retraite. Il connaît tout le monde et même tout sur tout le monde.


Une délicieuse odeur de pêches envahit le palier. C’est sûrement Madame Roux qui prépare des confitures. Il n’y en a plus beaucoup des mères de famille remarquables comme elle.


En passant devant la porte de Franck Para, il voit un nouveau panneau. Il y avait déjà :

« Démarchages inutiles »

« Sondages : Allez voir ailleurs, mes réponses ne vous plairaient pas ! »

« Étrennes : Je me déplacerai moi-même »

Désormais on peut lire :

« Sonnette piégée : Une mitraillette chargée vise la porte. »


Para décidément devient complètement dingue. Sa porte est en face de celle de Dubois qui se avance sur la pointe des pieds. C’est une blague de mauvais goût ou un avertissement réel ?

Dubois pense que cette fois-ci, il faut au moins en parler à Georges Poulet, le flic en retraite du 5ème. Lui au moins, il doit savoir si c’est autorisé d’effrayer ses voisins de la sorte en voulant se protéger du monde extérieur où il ne voit que du danger.

Le plus grand danger pense Dubois, c’est bien Para. Depuis qu’il a emménagé, l’ambiance est moins familiale dans l’immeuble, comme si un climat de méfiance grignotait les murs bleus des couloirs.

Atelier ”La vie de quartier” 22/10/21



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