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  • Josette Levot

Discrétion

Je resterai discrète sur le nombre d'anniversaires que l'on m'a fêtés... Je vais toutefois en évoquer deux d'importance ou plutôt qui ont marqué d'une pierre blanche ces journées de fête familiale, gâteau, cadeaux qui aujourd'hui se bousculent un peu et font fi de la chronologie.

Le premier c'était en soixante-neuf. J'étais dans un lit d'hôpital, groggye, fatiguée, la lumière et les sons, comme tamisés. Et une pensée qui s'immisce, s'installe, claire : c'est ainsi que je suis

née ! Je venais de faire le chemin emprunté par toutes les femmes et par ma mère !

J'ai vécu véritablement mon anniversaire le jour où j'ai mis ma fille au monde ! Je ne dirai pas le bonheur du premier regard, du premier baiser, de la première tétée.

Ces moments restent cachés au fond de ma mémoire et je ne tiens pas tant à les partager que les chérir, comme un trésor dont seule je dispose.

Mais que dirait ma mère ? De ma venue au monde. Une personne si discrète, si effacée ; que je suis la seule à nommer dans mes pensées « toujours sourire » en référence aux paroles de l'opérette le pays du sourire de Frantz Léard qu'elle fredonnait souvent et qui se poursuivait par « le cœur douloureux ».

J'ai attendu le moment propice pour lui faire raconter. Et ça c'était un sacré anniversaire ! J'étais le troisième enfant et le premier à naître à la première maternité de la ville !

À quelle adresse ?

Caserne Beurnonville avenue de la deuxième DB, Troyes.

Notre bonne ville dans l'euphorie de l'après-guerre et devant le nombre exponentiel des naissances, qu'on appelle désormais le baby-boom, avait jugé opportun de transformer une aile

de la caserne en salle d'accouchement. Le bâtiment était immense plus d'un millier de soldats pouvait y être logé et puis les nuées sombres de la guerre s'éloignaient, on allait rendre les

hommes à la patrie...

Les derniers occupants furent des FFI. Un signe du destin ? Je crois que j'ai été doté du gène de la résistance ! Je suis arrivée en fanfare ! Les photos des premiers bébés entourés de militaires et d'officiels ont fait la « une » des journaux locaux.

Je suis née le jour de mon anniversaire !

J'évoquerai plus sobrement et brièvement cette deuxième « pierre blanche » :

Née début quarante-sept, donc 40 ans en quatre-vingt-sept, encore jeune, un peu moins sure des ponts jetés sur l'avenir mais consciente que le temps nous est compté... Mon père nous a

quitté quelques semaines avant mon anniversaire.

Pas de « bon anniversaire » pour mes 40 ans.

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