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  • Raphaël K

Il y a quelqu’un qui m’attends quelque part ou le complexe de l’écrivain

- « Comment vas-tu ? » demanda-t-elle.

- « Ça peut aller ! » répondit-il.

- Ça veut dire que ça ne va pas très bien.

- On peut dire ça.

- Je vais devoir faire un aparté très psychologue.

- Pourquoi ?

- Parce qu’on est deux, tu n’es plus tout seul. On est parti faire ce voyage ensemble, on ne peut pas vivre comme si on était séparés.

- « Oui, c’est vrai ». dit-il.

- Dis-moi au moins à quoi tu penses.

- Bon, je vais essayer d’exprimer le fond de ma pensée, mais ça ne va pas être facile.

J’ai commencé à écrire très jeune et je n’ai jamais cessé. Tu vois, la plupart des écrivains disent : c’est ma raison d’être, ils vous lâchent des phrases grandiloquentes du genre, je me nourris de mon art, il me comble, me remplit. J’y trouve mon équilibre et je pourrai continuer longtemps à aligner ces sempiternelles citations.

Pour moi, c’est une façon de ne pas vivre. Je veux dire que tu

crées une histoire et tu t’enfermes dedans et plus rien n’a

d’importance, le monde autour de toi se referme comme s’il

n’existait plus, et tu ne fais plus attention aux personnes de ton

entourage. J’ai toujours fait ça et un beau jour tu te rends compte

que les personnes que tu aimes le plus au monde on disparut. Elles

en ont eu marre de t’attendre, d’espérer te voir enfin sortir de ta

bulle, te voir affronter enfin la vie réelle et ne pas rester dans un monde fantoche.

Il se peut aussi que je n’ai jamais aimé personne dans ma vie. Je

suis resté soumis à mes histoires fictives, dans mes soliloques

stériles, dans un monde spirituel, splendide, agréable mais irréel. Je ne m’aime pas moi-même.

- Tu aimes les livres que tu as écris ? Tu me décris tes personnages, avec une telle allégresse, tu vis à travers eux, on sent cette délicatesse dont tu les peints, tu les habilles avec une telle tendresse.

- Non, je n’aime pas mes livres.

- Pourquoi ?

- Ils ne me font pas revenir dans le monde réel et ils ne le changent pas.

- Tu crois que c’est utile de changer le monde ?

- Bien entendu sinon pourquoi écrire ?

- Comme tu dis, tu écris aussi pour t’inventer une vie avec des

personnages animés d’émotions. C’est ça qui te fait vibrer ; ils te

font dépasser tes peurs et guérir tes angoisses.

Tu écris pour faire revivre le frère que tu n’as jamais eu. En plus tu es jaloux car tu as fait de lui la personne construit que tu aurais souhaité être. Tu te compares à un être imaginaire et tu regrettes de ne pas lui ressembler. En réalité tu ne t’assumes pas, tu n’as aucune complaisance pour toi-même et tu ne te fais pas de cadeaux. Tu ne t’aimes pas, c’est possible, tu n’aimes personne, ce sont tes mots, mais je suis sûr que tu dois au moins aimer ce personnage puisque tu es jaloux de lui.

- Si je suis jaloux de lui, je ne peux pas l’aimer.

- Au contraire il représente ce que tu aurais voulu être, c’est la cause de ta jalousie.

- La discussion s’arrête là alors !

- Ce personnage c’est ta création, c’est toi. Tu ne peux pas être

jaloux de toi-même. Tu dois seulement l’intégrer, le digérer,

l’adopter et surtout l’apprivoiser. C’est la meilleure partie de toi-même. Fait ce travail et tu pourras à nouveau t’aimer et aimer ceux qui t’entourent. Tu veux changer le monde à travers tes livres, mais pour l’instant tu n’essaies pas de changer le monde mais ton propre petit univers, toi et le frère que tu aurais voulu être. Tu t’en veux de t’occuper seulement de ton microcosme en espérant changer l’univers ! A ta place je me sentirais frustrée aussi.

- Oui mais je te rappelle que tu n’es pas à ma place…

- Ça ne risque pas. Ecoute, j’attendrais le temps qu’il faudra, je n’ai pas la même opinion que toi sur ta personne, et je suis sûre que tu en vaux la peine. Fais-moi signe quand tu auras fini ce travail. En attendant, continuons notre voyage, on verra bien pour la suite.

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