- Nicole Beyou
Christos
Cette feuille je l’ai trouvée sur un quai dans un port dont je tairai le nom.
Elle voletait dans la brise marine et venait d’être jetée ou perdue car elle ne portait aucune trace de terre et n’était pas abîmée.
Pourquoi m’a-t-elle m’a fait penser aux messages que les déportés lançaient des wagons avec une adresse et un dernier adieu ? Comment savoir de quelle main ou de quelle poche elle venait de s’envoler ? J’ai tout de suite imaginé qu’elle avait une extrême importance pour celui ou celle qui l’avait écrite.
Autour de moi, la foule des promeneurs, appareils photos ou guide touristiques à la main n’avait de regard ni pour moi ni pour cette petite feuille arrachée à un carnet à spirales et que j’ai très vite appelée ma Pierre de Rosette. Mais, contrairement à Champollion, il m’a été impossible de comprendre quelque chose à cette avalanche
de lettres malhabiles.
Cependant, à force de l’examiner, j’y ai repéré quelques suites de lettres pouvant faire penser à des mots dont celui-ci « Christos » qui revient à plusieurs reprises.
Qui es-tu Christos ? Un frère, un ami, pour celui ou celle qui a écrit ce texte dont le sens m’échappe.
Mais qui m’empêche de lui en donner un ? Champollion a peut-être tout inventé lui aussi ?!
« Tu es la première personne qui m’a tendu la main quand j’ai échoué sur ton île.
Toi Christos, moi S… venant d’un triste pays où il ne fait pas bon vivre. Christos, tu m’as enveloppé dans une couverture et conduit dans un abri. Tu m’as donné du thé et une galette au miel. J’ai pensé que j’étais mort et que tu étais un ange du paradis.
Christos, mes yeux brûlés n’ont pas bien vu ton visage mais je n’oublierai jamais

ton nom. »